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Les nouveaux objets de l’entrepôt

01.03.2017

Souvent robotisés, ces nouveaux objets s’insèrent depuis peu dans les process d’entrepôt. Ils remplacent, assistent ou complètent certains postes manuels. Passage en revue de ces systèmes innovants qui devraient gagner en maturité technologique et en rentabilité dans un proche avenir.

Petits robots mobiles amenant des étagères ou des bacs d’articles à une station de préparation de commandes, bras robotisés pour palettiser ou dépalettiser, drones d’inventaire sillonnant les allées de rayonnages, armatures de type exosquelettes d’aide à la manutention, petits robots d’assistance au copacking, lunettes connectées ou à réalité augmentée pour faire du picking by vision, gants connectés permettant de scanner les colis… Ces nouveaux objets ou systèmes innovants, souvent très automatisés, investissent les entrepôts depuis deux ou trois ans et sont en train de remodeler progressivement l’ensemble des process logistiques, de la réception des produits jusqu’à leur expédition, en passant par le stockage, la préparation de commandes et le conditionnement à façon. Souples, faciles à mettre en place et beaucoup moins chers que les grands systèmes rigides et intégrés d’automatisation et de mécanisation, ils s’immiscent progressivement dans les processus de l’entrepôt pour remplir des tâches ou des fonctions précises. Ils répondent en cela à l’évolution des besoins logistiques et visent à satisfaire les nouveaux enjeux stratégiques et opérationnels qui se présentent aux entreprises à l’ère du digital. Ces dernières doivent en effet s’adapter à de nouveaux besoins liés à des contraintes grandissantes. « Face à l’essor de l’e-commerce qui a ouvert la voie à une distribution dont il faut satisfaire tous les canaux de distribution en respectant des exigences de plus en plus fortes sur le prix, la qualité, la disponibilité des produits et le raccourcissement des délais de livraison, la logistique, qui devient de plus en plus fine en traitant les commandes au détail, voit son coût grimper. Elle doit donc optimiser son fonctionnement en générant des économies. Or, si elle est employée à bon escient, la robotique légère doit permettre de faire baisser les coûts logistiques tout en améliorant la qualité de service », explique Xavier Barras, directeur des opérations de GS1 France, association qui a publié un livre blanc sur les enjeux et les perspectives de la robotisation en logistique. « Il s’agit d’introduire des outils de robotisation sur des fonctions pertinentes dans une partie des tâches des process logistiques pour en accroître la productivité, l’agilité et la réactivité. En pratique, les solutions robotiques accélèrent les process logistiques, contraints de traiter de plus en plus vite de grandes quantités de colis », ajoute Cassi Belazouz, manager omnicanal de GS1 France.

Des robots connectés

Les robots peuvent en effet travailler sur une plage horaire de 24 heures par jour en s’affranchissant des conditions de température, d’éclairage ou du poids total soulevé dans la journée. En résultent une productivité, une régularité et une qualité de réalisation des tâches supérieures à celle de l’homme. En même temps, l’utilisation de robots apporte une meilleure ergonomie des postes de travail et contribue à lutter contre la pénibilité, les troubles musculo-squelettiques (TMS) et les accidents du travail, en évitant à l’opérateur d’effectuer les tâches les plus pénibles et répétitives. « Les robots sont destinés à remplacer, compléter ou assister certains postes pour baisser le coût logistique et accroître l’efficacité tout en allégeant le travail humain », résume Cassi Belazouz. C’est le cas des solutions robotiques de préparation de commande de type goods to person qui se multiplient aujourd’hui. Ces systèmes sont bâtis autour d’une flotte de robots mobiles collaboratifs qui apportent automatiquement les produits nécessaires à l’opérateur pour lui permettre de préparer ses commandes sans se déplacer ni quitter son poste de préparation. Cela lui permet d’être plus productif tout en ayant la possibilité de préparer plusieurs commandes à la fois ou de les préparer plus rapidement. Ces dispositifs sont en général dédiés à la logistique de l’e-commerce. Ils offrent en outre un important gain de place puisque la largeur de l’allée entre les rayonnages est limitée à l’encombrement du robot, souvent de petite taille. « Notre solution permet de gagner 30 % d’espace de stockage, d’augmenter de 400 % la productivité des préparations de commandes par rapport à un procédé classique et d’éviter à l’opérateur de faire en moyenne 15 km par jour pour collecter les produits dans les rayonnages », affirme Olivier Rochet, président et fondateur de Scallog, concepteur et fabricant de solutions robotiques pour la logistique de distribution. Le système de Scallog met en œuvre une flotte de robots autonomes qui suivent par guidage optique des bandes adhésives placées au sol pour amener des étagères de stockage de pièces à un poste de préparation de commandes. « C’est un dispositif fermé et livré avec les étagères, dont le pilotage informatique est interfacé avec le WMS pour récupérer l’ordonnancement des commandes de façon à coordonner les missions des robots », explique-t-il, avant de préciser que le système « a vocation à ne couvrir qu’une petite partie d’un entrepôt et à traiter des produits à faible rotation ».

La start-up Exotec Solutions propose une solution similaire, dirigée par une intelligence centrale qui coordonne les robots avec l’activité des équipes. Mais ici, les robots qui amènent les supports d’articles au préparateur se géolocalisent eux-mêmes, sans guidage au sol, et sont pilotés par un système de supervision qui transforme le portefeuille de commandes du WMS en missions pour les robots et en instructions pour le préparateur. « Notre système est flexible, il peut être étendu ou réduit en fonction des besoins des clients par une simple reconfiguration logicielle », indique Romain Moulin, Pdg et cofondateur d’Exotec Solutions. Cette solution, poursuit-il, « est appropriée à la logistique de l’e-commerce non alimentaire et apporte un gain dans l’efficacité du picking en doublant la capacité de préparations de commande ». Les entreprises et enseignes de distribution l’ont bien compris qui commencent à adopter ce type de solution robotique. « On prépare le déploiement de notre système chez un premier client au second semestre 2017. »

La solution de Scallog est déjà opérationnelle chez Airbus via son prestataire in situ Idea. Elle est également déployée chez le logisticien BSL-Log qui l’utilise pour l’Oréal, l’enseigne de mode à bas prix Gemo, Viapost, spécialiste de la logistique du commerce connecté du groupe La Poste et Rhenus Logistics pour un client du secteur de la lingerie fine.

Cobots, exosquelettes et bras mécatroniques

D’autres sortes de robots collaboratifs (ou cobots), fixes cette fois, commencent aussi à s’intégrer dans les ateliers de copacking pour assister les opérateurs, alléger leur tâche et accroître la productivité. Dans ce domaine, le logisticien FM Logistic semble précurseur. « Nous avons implanté une dizaine de lignes de conditionnement de produits sur nos sites français, dotées en tout d’une quinzaine de petits cobots qui travaillent en complément des opérateurs manuels », exposait fin 2016 Jean-Christophe Machet, son président. « Déployer des lignes de copacking entièrement robotisées, équipées d’un premier bras robotisé collaboratif qui retire les produits des cartons et d’un second qui reprend les produits pour les assembler dans des colis, va même devenir possible », ajoute Patrick Bellart, directeur Innovation technologique et automatisation chez FM Logistic. Quel que soit le niveau de robotisation de ses ateliers de copacking, le logisticien tire de l’emploi de ces cobots des gains indéniables. « La productivité s’accroît avec des robots capables d’effectuer une centaine de mouvements/prélèvements par heure tout en augmentant le confort de travail de l’opérateur », confirme Patrick Bellart. Le prestataire souhaite poursuivre ses investissements dans la robotisation du conditionnement à façon en 2017 et 2018, en comptant déployer plus de 50 cobots de copacking dans ses divers entrepôts.

Son confrère Kuehne + Nagel (K + N) investit aussi beaucoup dans les cobots dédiés aux opérations de copacking. « On déploie ce type de robot collaboratif sur le copacking des produits de notre client Unilever. Le robot sort les produits des cartons avant que l’opérateur ne les regroupe et reconfectionne le colis », indique Benjamin Bronca, responsable Innovation de K + N. Surtout, le logisticien teste une autre sorte de cobot, apportant une aide directe à la manipulation: une armature robotisée de type exosquelette décuple ici la force humaine. « On en teste deux types dans un entrepôt pour un leader mondial des barbecues, des produits pesant de 15 à 20 kg. Ils offrent chacun une aide spécifique: soit une assistance dans le geste et la posture de l’opérateur, soit dans le port de charge », poursuit-il. Le premier type d’exosquelette, un dispositif mécatronique léger qui soutient avec une grande fluidité le bras et le dos de l’opérateur, lui facilite la prise de colis au sol en lui évitant de se courber. Le second permet de réduire le poids de charge de 50 % pour l’opérateur. « Ces armatures robotisées d’aide à la manutention sont en plein essor en logistique. Cela peut concerner de nombreux clients sur des opérations de port de charge répétitif ou sur certaines activités de préparations de commande, en allégeant le geste et la posture du préparateur qui peut se déplacer avec », assure Benjamin Bronca. Pour libérer l’opérateur de tout effort, d’autres cobots sont employés sous la forme de bras robotisés fixés en hauteur et commandés par le manutentionnaire. Ils permettent à un homme de charger, sans effort, des articles lourds (type sacs de farine ou fûts de bière). C’est l’homme qui définit le mouvement mais c’est le robot qui porte la charge, améliorant ainsi l’ergonomie des postes de travail. Ces outils sont particulièrement souples car, contrairement aux bras robotisés industriels classiques, ils ne nécessitent pas d’importants coûts de paramétrage.

Depuis quelques années, certains robots venant de l’industrie font leur apparition dans les entrepôts: ce sont des bras mécatroniques automatisés. Grâce à un système de préhension, ils permettent de manipuler des objets. Ils sont surtout appliqués aux opérations de palettisation et de dépalettisation. Ces bras articulés sont désormais utilisés en entrepôt pour trier des colis (cartons, bacs, plastiques) ou les positionner sur des palettes. FM Logistic va ainsi déployer des robots de palettisation et de dépalettisation en amont et en aval de ses lignes de copacking pour en faire des lignes totalement robotisées. « Ces machines puissantes travaillent vite et peuvent prendre des charges élevées », souligne Patrick Bellart. Aujourd’hui, des systèmes logiciels de construction 3D permettent à ces robots, à l’origine industriels, de reconstituer des palettes hétérogènes. En manipulant jusqu’à plus de 800 colis par heure, ils peuvent même, selon la configuration de l’entrepôt, constituer plusieurs palettes en parallèle. Leurs installations pour des opérations de picking et de palettisation en entrepôts surgelés (où le format des cartons est relativement homogène) se multiplient, évitant ainsi aux opérateurs de travailler dans un environnement trop contraignant.

Rentabilité face à l’homme

Les robots industriels, qui exigent souvent un coût d’investissement important, semblent cependant moins rentables que les systèmes de robotique ou de cobotique légère. « Le coût d’un cobot revient entre 30 000 et 50 000 € l’unité. Cela équivaut au coût salarial d’un opérateur pendant un an. Son retour sur investissement (ROI) peut donc être rapide, de l’ordre d’un an ou deux, alors qu’un robot industriel, qui vaut plusieurs centaines de milliers d’euros, ne sera rentable qu’au bout de trois à cinq ans », estime Benjamin Bronca. « L’équation de la rentabilité d’un robot ne se joue pas uniquement sur son coût d’achat mais également sur son taux d’utilisation, son coût de maintenance et son temps de réglage. La logistique doit gérer des séries de production plus courtes que l’industrie. Il faut donc adapter plus fréquemment les réglages, ce qui peut réduire sa disponibilité. En effet, un robot doit être employé tout le temps pour être rentable. Or, il ne peut pas passer rapidement d’une fonction à une autre, alors que l’homme est, lui, polyvalent. Il faut aussi tenir compte de sa maintenance dont le coût est de 10 % à 15 % de sa valeur d’achat », remarque Patrick Bellart.

Pour les drones qui sont expérimentés depuis peu dans les entrepôts afin d’automatiser la réalisation des inventaires de stock, la question de la rentabilité ne se pose pas encore, pour la bonne raison que l’on en est qu’aux balbutiements sur ce type d’application. Les solutions semblent cependant présenter d’indéniables atouts. Ces équipements, dont le coût à l’unité avoisine 30 000 euros, permettent de faire des inventaires permanents, tout en améliorant sensiblement la qualité et la productivité des opérations. Ils font le travail de deux opérateurs (un conducteur de nacelle et un opérateur qui scanne les étiquettes) en agissant en temps masqué (la nuit), en automatisant et en multipliant l’enregistrement des stocks pour en optimiser la gestion. Le principe est d’équiper le drone d’outils de reconnaissance (caméra, lecteur de codes à barres, antenne de RFID, etc.) pour lui permettre de localiser et d’enregistrer de manière autonome les produits référencés dans un centre de stockage en lien avec le WMS. Par ailleurs, les drones, en évoluant dans l’air, accèdent facilement à des colis placés en hauteur et permettent de retrouver des paquets qui auraient été mal positionnés. En équipant le drone d’une caméra ou d’un capteur thermique, celui-ci peut également assurer la surveillance du centre de stockage, aussi bien pour signaler les produits mal rangés que les palettes écroulées ou les intrusions.

L’avenir des drones

Pour ce qui est de savoir quand on verra vraiment ces drôles de machines voler le long des allées de rayonnage, la réponse, à en croire les futurs vendeurs, est pour bientôt. Certains prototypes devraient être pré-industrialisés dans le courant de 2017, après de nombreux tests manifestement probants. L’éditeur de logiciel Hardis Group, en coopération avec Squadrone System, entreprise spécialisée dans les drones sans pilote en conditions extrêmes, prévoit de « lancer la pré-industrialisation de son drone inventoriste à la fin du second trimestre 2017 », déclare Jean-Yves Costa, directeur adjoint de la division logistique. Ce drone, baptisé Eyesee, pour lequel Hardis a déposé un brevet en 2015, a été expérimenté à de multiples reprises dans l’entrepôt de Lyon-Satolas (Rhône) du prestataire FM Logistic et sur un autre site du logisticien depuis septembre 2016. Développé en association avec Squadrone, le drone a subi des tests relatifs aux conditions de vol (cartographie du site, géolocalisation, configurations d’éclairage, surfaces rencontrées, etc.) et à la récupération des informations nécessaires à l’inventaire (lectures d’étiquettes). Équipé de capteurs, il peut se déplacer au sein de l’entrepôt de manière autonome, sous le contrôle d’un opérateur. Grâce à une caméra embarquée, il est capable d’identifier et de capturer les données d’inventaires, qui sont ensuite transmises à n’importe quel WMS du marché. L’objectif est donc toujours de gagner en productivité et en sécurité dans les opérations d’inventaire et de contrôles de stocks. « Notre drone enregistre le code-barres de palettes par emplacement en seulement 15 secondes contre 2 minutes en mode manuel », explique Jean-Yves Costa. L’appareil est piloté par un opérateur, via une application métier sur tablette qui lui fournit le plan de vol correspondant à la cartographie de la mission et aux emplacements du stock à traiter. Cela permet au drone de s’autogérer dans un espace à trois dimensions. À l’aide d’une caméra embarquée, l’appareil photographie le code-barres des palettes stockées, l’image est ensuite traitée par un logiciel, également embarqué, puis transmise à l’application métier. Celle-ci est capable de reconnaître le bon code-barres sur le bon emplacement par comparaison avec les informations que lui transmet le WMS. « La phase d’inventaire dure 10 à 12 minutes, le temps d’autonomie du drone. Mais nous visons à doubler cette autonomie dans le courant de 2017 », avoue Jean-Yves Costa. Le dispositif ne peut aujourd’hui balayer qu’un côté d’une allée de rayonnage, mais Hardis Group compte donner à moyen terme à son drone la possibilité de contrôler « les deux faces d’une allée en une seule mission ». « Pour l’heure, la solution de Hardis est adaptée à la réalisation d’inventaires rapides dans des entrepôts de taille moyenne », relève Patrick Bellart.

De même, Geodis et Delta Drone, spécialiste des drones civils à usage professionnel, envisagent l’industrialisation, au deuxième trimestre 2017, d’un prototype similaire, après de nombreux tests réalisés en conditions réelles en 2016 dans deux entrepôts du logisticien. Le 28 avril 2016, les deux partenaires avaient en effet signé un accord visant à développer en commun une solution d’inventaire automatisée en entrepôt reposant sur l’utilisation de drones. Cette solution, qui permet le comptage et le reporting des données en temps réel, vise à intégrer toute la chaîne de valeur, y compris la partie traitement des données et restitution dans le WMS de Geodis. Mais la technologie est ici un peu différente de celle de Hardis et Squadrone. La solution est totalement autonome au plan énergétique. Elle utilise un petit robot mobile qui est relié au drone par un fil électrique lorsqu’il l’alimente en énergie. « Le robot se géolocalise de lui-même dans l’entrepôt et suit un parcours qui est programmé et combiné avec le plan de vol du drone », précise Vincent Cadene, directeur de projet Business development de Delta Drone. À part cela, le drone fonctionne comme celui de Hardis, par capture et traitement d’images de code-barres de palettes par emplacement. « Notre drone peut ainsi inspecter les deux côtés d’une allée de rayonnage et contrôler plusieurs allées successives », ajoute Vincent Cadene.

Objets connectés et réalité augmentée

Mais au-delà de tous ces objets ou systèmes robotisés, d’autres éléments innovants pointent le bout de leur nez dans les entrepôts. Il s’agit d’objets connectés qui pourraient être notamment employés dans la préparation de commandes. C’est le cas de gants, portés par un opérateur et connectés au WMS, qui permettent de scanner les colis. Ces gants « électroniques » sont notamment testés chez Airbus et Audi. Apparaissent aussi des lunettes intelligentes et connectées de type Google Glass qui facilitent la réalisation du picking uniquement par la vision de l’opérateur. Le pick by vision consiste ainsi à le doter de lunettes intelligentes et connectées au WMS de l’entrepôt. Le préparateur reçoit en surimpression sur les verres des lunettes les ordres de prélèvements du WMS. Il n’a alors plus qu’à scanner, via un scan sur ses lunettes, le code-barres correspondant au carton à prélever. « Nous testons cette technologie de réalité augmentée dans deux sites en Allemagne. Elle permet en effet de gagner en productivité et en qualité. Le pick by vision devrait se généraliser en logistique d’ici 10 ans, le temps que la technologie devienne mature » confie Benjamin Bronca de K+N.

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